Le placenta
Pour que le bébé puisse pousser son premier cri, s’exprimer à l’air libre, respirer et donc vivre, la condition c’est qu’il perde ses membranes, le liquide amniotique, et son placenta, le double, le compagnon obscur des profondeurs ».
Bernard This
Durant la grossesse, le placenta, un organe issu des mêmes cellules que le fœtus, le relie à sa mère par l’intermédiaire du cordon ombilical. Le placenta s’implante sur la paroi utérine. Il assure plusieurs rôles pour le bébé, la respiration, l’alimentation, la production d’hormones et l’élimination des « déchets ». Tous ces échanges vont s’effectuer par le biais du cordon ombilical qui relie le bébé à son placenta.
Lorsque le bébé vient au monde il est toujours relié à son placenta par le cordon ombilical. Puis le placenta se détache de la paroi utérine maternelle, à la reprise des contactions, pour être expulsé par voie basse de manière naturelle en moyenne 15 à 20 minutes après la naissance du bébé, mais ça peut être plus tard.
Le co-parent est souvent invité à couper le cordon qui sépare le bébé de sa mère. Or ce n’est pas de sa mère que le bébé est brusquement coupé, mais de son placenta à travers lequel il a été nourri ces 9 mois durant. Je rappelle que le placenta appartient à l’enfant, il est issu des mêmes cellules embryonnaires dont il s’est différencié pour devenir fœtus.
Le clampage (action de couper la circulation de sang dans le cordon ombilical) peut se faire à différents moments. Lorsque la situation est optimale, il n’y a aucune urgence à clamper le cordon. Le clampage est dit précoce s’il est effectué dans les 60 premières secondes de vie du bébé. On le dit « tardif » lorsqu’il est effectué à plus d’une minute et davantage. Idéalement l’oms recommande d’attendre 3 minutes minimum avant de clamper le cordon. S’il est possible d’attendre que le cordon ait fini de battre c’est vraiment idéal et les avantages sont majorés.
Frederik Leboyer, défenseur des naissances et physiologiques et de l’accueil de respectueux des bébés, écrivait en 1974 :
« La nature fait en sorte que, pendant le passage périlleux qu’est la naissance, l’enfant soit oxygéné deux fois au lieu d’une : par ses poumons et par son cordon. Deux systèmes fonctionnent ensemble, l’un prenant le relais de l’autre : l’ancien, le cordon, continue d’oxygéner l’enfant jusqu’à ce que le nouveau, les poumons, ait pleinement pris la relève. »
Dans ses travaux, il a mis notamment en lien l’influence positive du clampage tardif du cordon et l’adaptation du nouveau né à la vie terrestre.
Pourquoi clamper tardivement le cordon ?
A la naissance environ un tiers du volume sanguin du bébé se trouve encore dans son placenta. Or de ce sang il en a besoin pour s’adapter à la vie terrestre et se remettre de ce passage vital et essentiel qu’est la naissance.
Les bébés dont le cordon est clampé tardivement sont mieux oxygénés et rosissent joliment. Bénéfices d’un clampage tardif du cordon :
La naissance peut-être très violente pour un bébé, cette pratique atténuerait le stress métabolique de la naissance. En effet il a besoin de douceur, de chaleur et d’enveloppement. Le froid est en effet une source de stress.
Les bénéfices sanguins : On constate une augmentation de la quantité de fer dans le sang. Le fer participe au développement du cerveau et du système nerveux central du bébé. Il jouerait un rôle dans la prévention de l’anémie à 6 mois de vie du bébé.
Augmentation de 50 à 60% des globules rouges. Le bébé est mieux oxygéné, ce qui a également un lien direct sur le cerveau.
L’augmentation du volume sanguin total permet ainsi au bébé une transition respiratoire plus douce, donc une adaptation néonatale optimale.
Il n’y a donc aucune urgence à couper le cordon. Les parents peuvent le mentionner sur leur plan de naissance. D’ailleurs dans le cas d’un accouchement physiologique, sans complications, il est important de prendre le temps d’accueillir le nouveau-né et de respecter ce moment, ces instants suspendu de la rencontre entre le bébé et ses parents, tous trois imbibés d’ocytocine. Une famille est en train de naitre. Cette démarche participe également à la prévention du lien précoce parents-enfant, fragile, ténu, et si merveilleux lorsque l’on peut assister à ce filage invisible de cette connexion magique entre le bébé et ses parents.
Placenta lotus
Cette pratique consiste à ne pas couper le cordon et attendre qu’il sèche et qu’il tombe de lui-même, en moyenne entre trois à six jours après la naissance, en laissant le bébé relié à son placenta.
Une fois le bébé né et le placenta expulsé, il est placé dans un bol auprès de sa mère. L’objectif est d’optimiser le transfert de sang entre le bébé et son placenta, offrant ainsi au nouveau-né les bienfaits du clampage tardif du cordon (voir les bienfaits plus haut). Mais le placenta lotus ne se limite pas à ces aspects pour la santé du bébé. En effet la démarche, pour les parents qui choisissent de le pratiquer, est beaucoup plus profonde et revêt une dimension spirituelle.
A travers l’histoire et les cultures du monde entier, le placenta revêt un statut singulier symbolique et sacré. En effet il y aurait un lien puissant entre le placenta et le bébé. Il serait une représentation physique de l’âme de l’enfant. Permettre au bébé de se détacher naturellement de son placenta lorsque le cordon est sec, lui permettrait de s’incarner pleinement dans son corps physique.
Le placenta, une partie de soi, un prolongement
Dans certaines croyances le placenta est désigné comme une sorte de jumeau du bébé. C’est pourquoi le traitement du placenta requiert des soins tout particuliers. Il peut être enterré sous un arbre particulier, ou mis dans une urne après avoir été réduit en cendre. Le lien entre l’enfant et son placenta est perpétué dans les soins dispensés à son arbre. D’ailleurs la forme même du placenta s’apparente à l’arbre. Durant la vie intra-utérine déjà, le placenta tel un arbre, solide, nourri la vie de l’enfant à naitre.
On peut faire fabriquer des granules spécifiques pour l’enfant à partir de son placenta. Ces granules vont augmenter son système immunitaire. C’est ce que l’on nomme l’isothérapie placentaire. Certains laboratoires en Suisse, en Belgique proposent la fabrication de tels granules. Le procédé de Korsakov permet aussi de créer soi-même une dilution homéopathique spécifique.
Il est également possible de faire une empreinte qui laissera à jamais une représentation imagée du placenta.
Un rituel à effectuer à la naissance : L’empreinte placentaire
Le placenta a une grande valeur symbolique et il peut être important pour vous d’en conserver une trace.
Encore une fois, mentionnez-le dans votre projet de naissance. Si vous vous faites accompagner par une doula, elle pourra s’en charger. Certaines sages-femmes, sensibilisées à cette approche, pourront vous soutenir dans la démarche. Il faut juste prévoir le matériel, des grandes feuilles de papier à dessin épaisse et des gants à usage unique.
« La réelle séparation ne se produit pas entre la mère et son enfant, mais bien entre l’enfant et son placenta. » Ginette Forget « Holos » La Présence en Soi: Guide spirituel - Arrimages Distribution.
Longtemps traité comme un déchet à l’hôpital, le placenta peut perpétuer sa fonction physiologique par un clampage tardif ou un placenta lotus, et sa fonction symbolique par l’attention qu’on lui porte et la manière de le traiter.
Pour finir … l’enfant et son placenta enterré au pied de l’arbre planté à sa naissance, sont liés à jamais. L’arbuste mêle ses racines à cet organe jumeau de l’enfant qui lui offre sa force, son énergie, le flux de vie.
Virginie Loth
Autrice, Naturo-Doula, art-thérapeute
Créatrice de Louve et Lune©
www.louveetlune.com
Témoignage d’Elodie
Lors de mon enfantement à la maison en 2020, nous avons souhaité honorer le placenta de notre fille de différentes manières. Il était en effet important pour nous de faire exister ce lien originel entre ma fille et moi à l’extérieur et son placenta est devenu alors symboliquement le prolongement de sa vie in utero.
D’abord, nous avons prélevé quelques morceaux de son placenta que nous avons mixés dans un smoothie aux fruits revitalisant.
D’autres morceaux ont permis la réalisation par nos soins de l’iso-placentaire qui servira de remède sous forme de gouttes pour toute la famille.

Quelques empreintes placentaires naturelles, avec le sang du placenta, ont ensuite été faites sur des feuilles ; nous avons pu les scanner et réduire en taille la plus jolie pour en réaliser un cadre.
Puis nous avons préparé le lotus. Pour ce faire, du gros sel non raffiné, des langes, et un panier en bambou ont permis de déposer le placenta et de le garder attaché à notre fille pendant ses premiers jours de vie. Tous les jours, de nouveaux aromates et végétaux choisis par nos autres enfants venaient orner le placenta après le changement de langes. Quand le cordon a séché, il est devenu très court et nous avons alors dit au revoir à ce « jumeau » désormais détaché de notre fille.
Plus tard, mes sœurs- amies m’ayant offert un cerisier lors de mon Blessing Way, un joli rituel a été célébré en famille : nous avons planté ce cerisier japonais avec les herbes, fleurs et aromates de notre jardin que nous avions joints au lotus. Nous y avons aussi déposé les pierres d’intention où chacun.e avait écrit un mot-vœu pour la naissance de bébé avant de refermer le trou. L’arbre pousse merveilleusement depuis !

Désormais, nous attendons le moment propice pour aller enterrer le placenta de notre fille à l’endroit que nous avons choisi. Le placenta, qui a entièrement séché, attend sagement le jour venu, toujours dans son panier de bambou.
Elodie RICHERT
Accompagnante de toutes celles en chemin
Instagram et Facebook: @ElodieLunessence
Légende photo placenta 1 : le placenta attaché à notre fille par le cordon, gros sel, branches de menthe, de sauge et de verveine
Légende photo placenta 2 : à gauche, sel, feuilles, écorces d’oranges et pétales de rose dans le panier de bambou- à droite, le placenta séché, attaché à son cordon